Aude Caussarieu

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24 septembre 2020

Quelle est la durée idéale d’une vidéo pédagogique?

On entend souvent qu’une vidéo ne devrait pas durer plus de quelques minutes car avec le développement des écrans, les gens n’auraient plus d’attention. Je vous explique pourquoi c’est un mythe quelle est la durée idéale d’une vidéo pédagogique. 

chat et papillon

Le mythe des vidéos courtes sur internet

Avec les TedX ou avec Tik-to, on s’est habitués aux vidéos très courtes. Il y a en effet d’excellentes vidéos très courtes qui sont très efficaces. C’est le cas par exemple du ted-talk parfait de Marta Zaraska sur pourquoi on est aussi accro à la viande. Je le décrypte ici sur le blog : lien vers l’article.

Mais pour autant la croyance : “pour que ça marche sur internet, il faut faire des vidéos courtes” est un mythe.

Le premier contre-exemple, c’est évidemment Netflix et tous les films ou documentaires que l’on regarde en ligne. Ça dure largement plus de quelques minutes, et l’on est captivé·e pendant parfois plus d’une heure sans décrocher. Donc ça n’est pas une question de capacités attentionnelles “dans l’absolu”.

 

On pourrait se dire que c’est lié au contenu : il est plus facile de rester attentif devant un film d’action que devant de la science par exemple. Et pourtant ! Et pourtant, si l’on s’intéresse à la vulgarisation scientifique, des youtubeurs célèbres comme e-penser ou science étonnante postent des vidéos longues qui sont visionnées plusieurs centaines de milliers de fois. C’est ce qu’explique très bien Vivianne Lalande, vulgarisatrice scientifique, dans sa chaine scilabus plus  :

Des vidéos pour enseigner, des vidéos pour vulgariser

M

Je trouve qu’il est important de faire la différence entre une vidéo qui vise à enseigner, et une vidéo de vulgarisation, qui vise à divertir ou à cultiver (et c’est une cause noble !).

capture de youtube de Nanci Pi et Physics Girl

Par exemple :

  • Les chaines Youtube micmaths, les bons profs, la chaîne de Nanci pi … sont des chaines de vidéos pédagogiques. Chaque vidéo vise à transmettre un élément de savoir ou un savoir-faire (how to…).
  • Les chaines YT scilabus, Florence Porcel, C’est une autre histoire, physics girl, etc sont des chaînes de vulgarisation scientifique. Cela ne veut pas dire qu’on n’y apprend rien. Cela signifie qu’elles sont pensées pour être visionnées en une fois, assis sur son canapé ou dans le métro, et pas à son bureau avec un brouillon pour prendre des notes. Lorsque l’on regarde une vidéo de vulgarisation, il est très peu probable que l’on revienne plus tard à la vidéo pour réviser.

 

Si l’on prend le temps d’étudier ces deux formats de vidéos, il y a plein de différences, mais dans les deux cas, toutes les durées sont possibles. Pour comprendre l’une des différences entre ces deux formats de vidéos, je vous propose un petit détour par l’histoire des livres et de la transmission des connaissances.

Des rouleaux aux livres à feuilleter

Dans le podcast de France Culture : “Le cours de l’histoire”, Xavier Mauduit et Maïwen Guiziou reviennent sur le rôle des livres dans la transmission des savoirs.

Je m’attendais à ce que l’on m’explique comment l’imprimerie avait révolutionné la transmission des connaissances en produisant beaucoup plus de livres que les moines copistes. Et pas du tout (ou pas seulement). Roger Chartier nous explique que c’est l’arrivée des codex  (=livres en feuillets reliés) qui a été un tournant technologique majeur dans la transmission des connaissances. L’histoire remonte donc à l’antiquité et non à la renaissance.

Codex moyen-âge

Codex du moyen-âge

En effet, ce format de manuscrit a remplacé les rouleaux en papyrus que l’on lisait au fur et à mesure. Quand on lit un rouleau (je ne l’ai jamais fait, mais je l’imagine bien !), il n’est pas facile de revenir à un passage en particulier. Avec l’arrivée du codex, il est possible de retrouver un passage précis grâce à l’index et il est possible de comparer facilement deux passages du même texte. Il devient en fait possible d’étudier un texte et plus uniquement de le lire.

La bonne longueur

Les vidéos sont un peu comme des rouleaux : il n’est pas facile de retrouver un passage dans la vidéo. On peut difficilement passer vite sur ce que l’on sait déjà ou ralentir pour ce que l’on découvre, ou encore réécouter une partie plusieurs fois (comment revenir exactement au début du passage que l’on veut réécouter?). Les vidéos ne sont en général pas chapitrées, il n’y a pas de titres intermédiaires, pas de possibilité de faire ctrl+F. Et c’est la bonne raison pour ne pas faire des vidéos trop longues. Une vidéo pour enseigner doit correspondre au développement d’une seule idée. La personne qui apprend ou qui révise peut ainsi souffler entre deux morceaux d’informations. Et elle pourra aussi plus facilement revenir pile au sujet qui l’intéresse plus tard.

  • Une vidéo pour enseigner = une information ou un savoir-faire
    La bonne durée d’une vidéo pour enseigner est celle qui permet d’expliquer complètement une idée. Il peut s’agir d’une courte explication de deux minutes ou bien un long développement sur 20 minutes avec plusieurs exemples. La vidéo d’un cours entier filmé n’est pas une “bonne” vidéo pour enseigner. Quand le cours est excellent, et qu’il n’y a pas mieux, c’est déjà ça. Mais un découpage de la vidéo en “capsules” serait bien plus utile pour les apprenant.e.s.
  • Une vidéo de vulgarisation = une histoire à raconter
    Dans le cas d’une vidéo de vulgarisation, la bonne longueur sera celle qui permet de dérouler une histoire en captivant l’attention du public tout du long. Une fois qu’on a dit ça, il y a plusieurs formats. Certain.e.s préfèrent raconter des histoires très denses avec un rythme très enlevé. D’autres préfèrent le format conférence en prenant le temps de rentrer dans davantage de détails ou de petits hors-sujets par rapport au message central. Tout est possible dans l’absolu, mais il y a probablement un format qui vous convient le mieux 🙂

Et pour conclure : la durée idéale d’une vidéo n’existe pas !!

—- Aude Caussarieu

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